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Le champion est un "bon client" pour la cocaïne

William Lowenstein est directeur de l'Institut Baron Maurice de Rothschild pour la recherche et le traitement des addictions. Il est notamment l'auteur de "Ces dépendances qui nous gouvernent" (Calmann-Lévy, 2005).

Etes-vous surpris par les contrôles positifs à la cocaïne de Richard Gasquet et Tom Boonen ?

Non. Le sportif professionnel est un "bon client" pour la cocaïne. Cette substance permet l'illusion d'être un champion : elle repousse la fatigue mais aussi le doute, la peur de l'autre, du présent et de l'avenir. Elle permet de "bouffer de l'autre" et d'assumer une position mégalomaniaque, de champion. La cocaïne donne l'illusion de répondre à une triple recherche chez le sportif de haut niveau : une maîtrise des émotions et de sa peur, l'ancrage mégalomaniaque de l'idée de réussite et la possibilité de rester en "hypermouvement". La cocaïne bénéficie encore, en France comme en de nombreux pays, d'une trop bonne image et d'une forte attractivité. Longtemps, elle est apparue, dans l'imaginaire commun, la drogue du winner, la drogue de la performance, la drogue des riches. Les stars, les artistes, les golden boys ou les publicitaires, et même les politiques, sont imaginés consommateurs de cette drogue pour assumer leurs performances ! Le milieu de la nuit, le milieu festif la propose pour réussir la fête. C'est une drogue "paillette", la substance qu'il faudrait dans la panoplie de la réussite en milieu urbain. Un patient, issu d'un milieu pauvre provincial, me disait récemment que le signe de sa réussite, après être "monté" à Paris, était d'avoir une maîtresse et de prendre de la cocaïne !

En quoi la cocaïne peut-elle être considérée comme un produit dopant ?

Les fonctions positives de la cocaïne telles que la résistance à la fatigue, l'euphorie, la diminution de la perception des douleurs, la pensée mégalomaniaque et l'hyperactivité locomotrice, font de cette substance psycho-active un produit dopant idéal. En pratique, c'est loin d'être le cas. Les effets ne durent que peu de temps : de 15 à 45 minutes, selon l'importance de la dose (sniffée le plus souvent) et l'ancienneté de l'intoxication. Et ils sont suivis, en l'absence de nouvelle prise, d'effets négatifs appelés "descente", véritable dépression et déplétion aiguë de dopamine dans le cerveau qui associe une angoisse majeure, une fatigue brutale et une diminution paralysante des mouvements. Pour éviter ces méfaits, lors d'un match, il faudrait que le sportif prenne une ligne de cocaïne tous les quarts d'heure. C'est assez difficile de rentrer au vestiaire quatre fois par set ! Enfin, physiquement, il faut rappeler que la prise de cocaïne entraîne une tachycardie (augmentation de la fréquence cardiaque), une hypertension artérielle, une vasoconstriction périphérique et une forte augmentation de la consommation d'oxygène ! Cela n'en fait vraiment pas une substance dopante idéale sur un match ! En bref, la cocaïne est un produit potentiellement dopant mais de maniement difficile dans une compétition longue et, encore plus, dans une carrière.

Pourquoi les champions semblent-ils aussi vulnérables face à cette drogue ?

Ce qui fait la qualité d'un champion en fait sa vulnérabilité face aux addictions. Dans une étude nationale, soutenue par le ministère de la jeunesse et des sports, nous avions montré il y a dix ans que les sportifs de haut niveau constituaient une population vulnérable aux addictions, notamment lors d'une blessure, d'une non-sélection ou à l'arrêt de leur carrière. Le champion ne va pas seulement plus vite que les autres, il pense aussi plus vite et est plus sensible. Un peu comme les enfants surdoués, ces champions, hyperactifs physiques, connaissent peu ou pas la tranquillité. Leur hyperréactivité et hypersensibilité ne se calment pas facilement, sauf en cas de rencontre avec des produits psycho-actifs. Les substances rencontrées – d'autant plus facilement qu'ils réussissent et accèdent à des milieux urbains nourris de pouvoir, d'argent et de cocaïne – vont alors leur servir d'automédication en leur permettant de lutter contre la peur des bouleversements de l'ascension sociale et de la notoriété, d'atténuer les souffrances endurées pendant des années d'entraînement, de voyage, de sélection, de solitude, loin de leur famille ou encore de gommer le stress de la pression et de l'exigence de performance. Devenir le Mozart du tennis, être à la première page des journaux, côtoyer du jour au lendemain les puissants de ce monde, l'argent et la renommée, à Paris ou à Miami, est une trajectoire hallucinante pour un adolescent élevé dans la quiétude du Languedoc. Aussi, je ne comprends pas que les fédérations sportives et les agences antidopage ne protègent pas plus ceux ou celles sur qui elles doivent veiller : les sportifs.

Que préconisez-vous pour aider les sportifs face aux risques d'addictions ?

En tant que médecin, il m'est toujours douloureux de voir que des problèmes de consommation de substances psychoactives, qui relèvent avant tout du privé, de l'intime, puissent ainsi jaillir publiquement avec une telle brutalité. Ces consommations me semblent devoir bien plus relever d'un cabinet médical, lieu de confiance et de non-jugement, que d'un tohu-bohu médiatique. Dans ce cadre, les fédérations sportives et agences anti-dopage ont une responsabilité quant à la protection des sportifs. L'accusation de dopage, la suspicion de tricherie ne constituent pas à mes yeux médicaux une excuse, voire une circonstance atténuante, pour jeter en pâture à l'opinion publique un homme en difficulté.

Propos recueillis par Stéphane Mandard



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